Par Franc Muller – Avocat licenciement, Paris

 

Pouvoir démontrer que le licenciement est infondé

Le licenciement, quel qu’en soit le motif, est souvent vécu comme un profond traumatisme par les salariés en qui en sont l’objet, et le sentiment d’injustice est prégnant.

Avant de saisir le Conseil de Prud’hommes, afin d’obtenir réparation du préjudice subi, il importe d’avoir quelques principes fondamentaux à l’esprit.

Le droit du travail prévoit qu’un licenciement, qu’il résulte d’un motif personnel (article L 1232-1) ou d’un motif économique (article L 1233-2), doit être justifié par une cause réelle et sérieuse,

Le salarié qui entend contester le bien-fondé de son licenciement doit en conséquence démontrer que son congédiement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il faut donc qu’il dispose de pièces précises (documents, mails, témoignages de collègues…) permettant de remettre en cause les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, et ceci quel qu’en soit le motif.

Toutefois, lorsqu’il s’agit d’une faute grave, la tâche est un peu facilitée car la charge de la preuve incombe à l’employeur et non au salarié, de sorte que c’est à lui d’établir que les faits qu’il invoque justifiaient véritablement un licenciement pour faute grave du salarié.

Qu’est ce qu’une cause réelle et sérieuse de licenciement ?

L’article L. 1235-1 du code du travail, précise qu’en cas de litige relatif au licenciement, le Juge, à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

La loi n’a pas défini ce qu’était une cause réelle et sérieuse.

Mais la jurisprudence en a précisé les contours, en exigeant du motif réel, qu’il soit à la fois existant, exact et objectif.

En outre, s’agissant du caractère sérieux, le ministre du Travail en avait, lors des débats parlementaires précédant l’adoption du Code du travail, donné une définition, qui n’a jamais été remise en question : « une cause sérieuse est une cause revêtant une certaine gravité qui rend impossible, sans dommage pour l’entreprise, la continuation du travail et qui rend nécessaire le licenciement » (Décl. min. Trav. 29 mai 1973 JOAN CR 30 mai, p. 1619).

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur doit toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

La lettre de licenciement doit répondre à des exigences précises pour être considérée comme valable

Lettre de licenciement

Le motif de licenciement est énoncé dans une lettre, qui est adressée au salarié par recommandée avec demande d’accusé de réception, c’est ce que l’on appelle « la notification » du licenciement.

Cette lettre de licenciement fixe les limites du litige, cette formule qui a été dégagée par la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation est désormais inscrite dans la loi (article L 1235-2 du code du travail).

Les Juges doivent, pour apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement, se tenir à l’énonciation des griefs qui y sont invoqués, sans tenir compte des éventuelles justifications qui pourraient être fournies par l’employeur, dans le cadre d’un débat judiciaire et qui n’auraient pas été mentionnées dans la lettre de licenciement.

Le licenciement doit reposer sur des griefs, précis, et matériellement vérifiables.

Toutefois, la loi Macron n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 a offert une possibilité d’échappatoire à l’employeur, dont la lettre est imprécise, en lui offrant la possibilité de régulariser la situation a posteriori.

En effet, lorsque le salarié considère que sa lettre de licenciement est imprécise, il dispose d’un délai de 15 jours, à compter de sa notification, pour demander à son employeur de lui apporter des précisions sur les motifs énoncés.

Celui-ci dispose alors du même délai (de 15 jours) pour répondre à l’intéressé.

L’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive plus, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse.

L’inévitable barème Macron

La contestation d’un licenciement ne peut totalement être détachée de la question de l’indemnisation du salarié, lorsque son licenciement est reconnu injustifié.

Le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est désormais fixé par un barème, connu sous le sobriquet de « barème Macron« .

Celui-ci détermine le montant de l’indemnité en fonction de l’ancienneté du salarié (article L 1235-3 du Code du travail).

Pour les salariés ayant une ancienneté inférieure à deux ans, celui-ci ne peut excéder trois mois de salaire, ce qui est évidemment de nature à rebuter ceux qui souhaitent s’engager dans une action contentieuse.

Le montant alloué est plafonné en tout état de cause à 20 mois de salaire (après 29 ans d’ancienneté).

Malheureusement, si des interrogations sur la validité juridique du barème Macron avaient pu susciter initialement les espoirs des avocats en droit du travail pour le faire écarter, la position adoptée par la Chambre sociale de la Cour de cassation a été de nature à les refroidir.

Elle a en effet affirmé avec fermeté, et hélas constance, que l’application de ce barème n’était pas contraire à la Loi.

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