La vertu ne compte manifestement pas parmi les principales qualités requises, et moins encore récompensées, en entreprise. Cette affirmation se vérifie notamment dans les décisions relatives aux lanceurs d’alerte dénonçant des faits délictuels commis par l’employeur, qui se suivent et se ressemblent sur ce point. Le salarié qui a le courage de se livrer à cette dénonciation le paie souvent cher, au prix d’un licenciement.
Si la liberté d’expression est une liberté fondamentale garantie par la Constitution ainsi que par plusieurs conventions internationales (dont le Convention Européenne des Droits de l’Homme), force est de constater que cette liberté ne vaut dans l’entreprise que tant qu’elle est tolérée par l’employeur
La jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation vient de s’enrichir d’une décision importante pour les salariés lanceurs d’alerte, visant à renforcer la protection légale dont ils bénéficient. On se souvient que le salarié qui relate ou témoigne, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ne peut être sanctionné ou licencié pour ce motif, à peine de nullité (articles L 1132-3-3 et L 1132-4 du Code du travail).
Le statut de lanceur d’alerte confère à son bénéficiaire une protection qui le met en principe à l’abri des mauvais coups de l’employeur et de ses mesures de rétorsion. L’article L 1132-3-3 du Code du travail dispose en effet qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions.
Le salarié ne peut être licencié pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.
Derrière le licenciement pour faute grave d’un salarié sous un motif fallacieux, se cachait en réalité sa dénonciation à l’employeur quelques mois plus tôt de faits de corruption qu’il avait constatés dans l’entreprise.
Que les salariés téméraires, qui dénoncent des délits commis dans leur entreprise et prennent ainsi le risque de représailles le sachent, la Cour de cassation veille ! L’heureuse démonstration vient d’être faite que la Haute juridiction assurait efficacement la protection des salariés victimes d’un licenciement après avoir signalé de bonne foi aux autorités publiques les conduites ou actes illicites qu’ils avaient constatés sur leur lieu de travail.
Une des dernières lois votées par le parlement en 2013 mérite qu’on s’y arrête, car elle introduit dans l’entreprise un vent de transparence qui fait suite aux débats ayant alimenté l’actualité de cette année.
Embrassant dans une même étreinte la triste affaire CAHUZAC et l’alerte donnée par Edward SNOWDEN sur le big Brother américain, la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, comporte un Titre 3 intitulé « des lanceurs d’alerte ».