Par Franc Muller – Avocat licenciement, Paris

 

Si l’employeur dispose du pouvoir disciplinaire lui permettant de sanctionner un salarié qu’il considère fautif, conformément aux prévisions de l’article L 1331-1 du Code du travail, la jurisprudence a instauré des garde-fous qui fixent des limites à ce pouvoir et soustraient le salarié à la mainmise de l’employeur, rendant sa sanction inopérante.

1ère question : qui incarne l’employeur ?

Le qualificatif d’employeur s’applique en premier lieu au détenteur du pouvoir de direction, de sorte qu’un supérieur hiérarchique titulaire d’un pouvoir disciplinaire ou un Directeur des Ressources Humaines personnifient à n’en pas douter l’employeur et sont à ce titre habilités à sanctionner un salarié.

Mais plus intéressant, la jurisprudence vient de rappeler que l’employeur, au sens de l’article L 1331-1 du Code du travail, s’entend non seulement du titulaire du pouvoir disciplinaire mais également du supérieur hiérarchique du salarié, même non titulaire de ce pouvoir.

Cette interprétation est importante car la Chambre sociale de la Cour de cassation retient depuis longtemps que l’employeur qui, bien qu’informé de faits qu’il reproché à un salarié, choisit de lui notifier un avertissement seulement pour certains d’entre eux, épuise son pouvoir disciplinaire et ne peut en conséquence prononcer ensuite un licenciement pour des faits qui étaient antérieurs à cette date (Cass. Soc. 16 mars 2010 n° 08-43057).

Voici une dernière illustration :

Un salarié, travaillant en qualité d’infirmier, reçoit un avertissement le 4 janvier 2013 en raison d’absences injustifiées et de négligences dans son travail, qui ont été constatées en octobre et novembre 2012.

Le 18 janvier 2013, suite à de nouveaux faits survenus 30 décembre 2012, le salarié est mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable, puis licencié pour faute grave par lettre du 4 février 2013.

Le salarié conteste son licenciement, soutenant que sa supérieure hiérarchique, infirmière coordinatrice, reconnaissait avoir eu connaissance des faits fondant son licenciement le 31 décembre 2012, soit avant la notification de l’avertissement du 4 janvier 2013.

L’employeur se justifie en soutenant que l’infirmière coordinatrice ne l’avait informé des faits litigieux que le 15 janvier 2013 et qu’il avait alors aussitôt réagi en mettant à pied le salarié et en le convoquant à un entretien disciplinaire trois jours plus tard, de sorte que la notification de l’avertissement du 4 janvier 2013 pour d’autres faits n’avait pas d’incidence et