Par Franc Muller – Avocat droit du travail, Paris

 

La plus grande méfiance s’impose à l’égard d’un avertissement, qu’il ne faut pas négliger

Le salarié qui reçoit un avertissement de son employeur doit se montrer vigilant et ne pas en sous-estimer la portée en se contentant d’y apporter une réponse orale, croyant que c’est la meilleure manière d’apaiser les choses.

Il convient au contraire d’y donner une réponse écrite et circonstanciée car elle-seule sera prise en considération et aura valeur probante si d’aventure l’avertissement constituait le prélude à un cheminement malheureux qui s’achève par un licenciement.

L’expérience montre en effet que l’avertissement révèle un message émis par l’employeur qu’il ne faut absolument pas négliger et qu’il est important de le contester, s’il est injustifié.

S’agissant de sa forme, l’employeur n’a pas l’obligation de suivre une procédure déterminée, ni d’envoyer une lettre recommandée.

Il y est cependant fait exception lorsque le règlement intérieur de l’entreprise prescrit l’observation d’une procédure spécifique ou qu’il exige que l’employeur se conforme aux dispositions prévues par le Code du travail en matière de sanction disciplinaire (articles L 1332-1 et L 1332-2) (Cass. Soc. 3 mai 2011 n° 10-14104).

De la même manière, une convention collective peut prévoir qu’un avertissement satisfasse à la procédure applicable en matière disciplinaire.

On rappellera à cet égard que l’article L 1332-2 du Code du travail impose à l’employeur qui envisage de prendre une sanction disciplinaire de convoquer l’intéressé en lui indiquant l’objet de la convocation et en lui précisant qu’il a la possibilité d’ être assisté à cet entretien, la sanction ne pouvant alors intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien.licenciement faute grave

Certaines conventions collectives subordonnent même la validité d’un licenciement pour motif disciplinaire à la notification préalable d’un, voire de deux, avertissements, ce qui est notamment le cas de la convention collective de travail des surveillants des établissements d’enseignement secondaire privés.

L’employeur doit alors respecter cette procédure, qui constitue pour le salarié une garantie de fond dont la méconnaissance conduit à l’annulation de la mesure prise (Cass. Soc. 13 fév. 2013 n° 11-27615).

Hormis les cas où le règlement intérieur ou la convention collective l’imposent, l’avertissement n’est pas soumis à des exigences spécifiques

L’avertissement étant considéré comme une « sanction légère », le respect de la procédure disciplinaire ne s’impose pas à l’employeur.

Nous avons ainsi déjà vu qu’un avertissement envoyé par simple mail pouvait avoir valeur de sanction disciplinaire.

Plus encore, lorsque l’employeur notifie au salarié un avertissement par courriel ou lettre recommandée de façon informelle sans l’avoir préalablement convoqué à un entretien et qu’il s’affranchit des exigences de l’article L 1332-2 du Code du travail, celles-ci ne peuvent lui être opposées.

La Chambre sociale de la Cour de cassation considère en effet qu’un avertissement intervenu après un entretien informel est régulier même s’il a été prononcé plus d’un mois après que cet entretien ait eu lieu (Cass. Soc. 5 déc. 2018 n° 17-13261).

Reste néanmoins que lorsque l’employeur choisit volontairement de donner à l’avertissement un retentissement particulier en observant la procédure légale applicable, il doit en respecter tous les termes.

C’est la précision que vient d’apporter la Haute juridiction.

Un salarié avait été convoqué par l’employeur à un entretien en vue d’une sanction disciplinaire selon les modalités prévues par l’article L 1332-2.

Un avertissement lui avait ensuite été notifié plus d’un mois après que l’entretien ait eu lieu.

Le salarié en contestait donc la validité et demandait le paiement de dommages intérêts en raison du préjudice qu’il avait subi.

La cour de cassation lui donne raison et juge que, dès lors qu’il a choisi de convoquer le salarié selon les modalités de l’article L 1332-2 du code du travail, l’employeur est tenu d’en respecter tous les termes, quelle que soit la sanction finalement infligée ; or selon ce texte, la sanction ne peut intervenir plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien (Cass. Soc. 9 oct. 2019 n° 18-15029).

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