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La discrimination, qu’elle soit fondée notamment sur la rémunération, l’affectation, la qualification, l’origine, le sexe, l’âge, l’appartenance à une ethnie ou une race, l’apparence physique, etc… est formellement prohibée par le Code du travail (article 1132-1) et rend nulle la rupture du contrat de travail. La Cour de cassation vient d’en offrir une récente illustration. Un salarié exerçait la fonction de chef de rang dans un restaurant gastronomique. Il portait des boucles d’oreilles, ce qui n’était manifestement pas du goût de son employeur, qui lui avait demandé de les ôter pendant le service.

Par Franc Muller – Avocat droit du travail, Paris

 

Le français est la langue normale de travail

Le Code du travail prévoit que tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l’exécution de son contrat doit être rédigé en français, ou à défaut, être accompagné d’une traduction (article L 1321-6).

Dans le même ordre d’idée d’ailleurs, il importe de signaler que le contrat de travail doit être rédigé en français (article L 1221-3).

Parenthèse historique : l’ordonnance d’août 1539, dite « ordonnance de Villers-Cotterêts », prise par le roi François 1er, imposait « l’usage du français dans les actes officiels et de justice ».

Les lois Toubon de 1994 ont repris et développé cette obligation, qui a été étendue aux actes de droit privé.

Or, les communications en entreprise, particulièrement dans les entreprises internationales, se font régulièrement en langue étrangère.

Mails, notes de services, instructions… sont ainsi couramment rédigés en anglais.

Qu’en est-il lorsqu’un salarié se plaint que les objectifs qui lui ont été fixés, et qui conditionnent le règlement d’une partie de sa rémunération, ont été rédigés en anglais ?

L’inopposabilité des documents fixant des objectifs en anglais, sauf exception

Les Juges ont eu à trancher cette question, et ont jugé, dans un premier temps, que les documents fixant les objectifs nécessaires à la rémunération du salarié, rédigés en anglais, lui étaient inopposables (Cass. Soc 29 juin 2011, n° 09-67492).

L’inopposabilité se traduit sur le plan juridique par l’inefficience de l’acte, et en conséquence, par le fait qu’il est dépourvu d’effet.

Sans remettre en cause cette position, la Chambre sociale de la Cour de cassation l’a ultérieurement nuancée en considérant que :

« Dès lors que le document fixant les objectifs permettant la détermination de la rémunération variable avait été rédigé en français et diffusé sur le site intranet de l’entreprise, l’employeur doit être regardé comme ayant satisfait à son obligation selon laquelle tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l’exécution de son travail doit être rédigé en français, quand bien même le plan d’objectifs avait été adressé au salarié en anglais » (Cass. soc. 21 sept. 2017 n° 16-20426).

Elle a en outre énoncé que « la règle selon laquelle tout document comportant des obligations pour le salarié ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l’exécution de son travail doit être rédigé en français n’est pas applicable aux documents reçus de l’étranger ou destinés à des étrangers » (Cass. soc. 24 juin 2015 n° 14-13829).

Franc Muller – Avocat licenciement, Paris

 

La prise d’acte, solution aux graves manquements commis par l’employeur

La vie en entreprise n’est pas toujours une partie de plaisir, elle peut aussi être source de situations conflictuelles.

Singulièrement, lorsque l’employeur ne respecte pas ses engagements, par exemple en refusant de payer un bonus qui est dû, en modifiant unilatéralement la rémunération, en se livrant à un harcèlement moral…

Le salarié victime de ces graves manquements est fondé, dans ces circonstances, à « prendre acte » de la rupture de son contrat de travail. Il suffit pour ce faire d’adresser, ou de faire adresser par son avocat, une lettre exposant les griefs imputés à l’employeur.
Cette prise d’acte produit alors un effet immédiat. Ce qui signifie que le contrat de travail prend fin à la date de réception par l’employeur de cette lettre, sans que le salarié soit tenu d’exécuter son préavis.

La prise d’acte produit les effets d’un licenciement injustifié

En outre, la prise d’acte, lorsqu’elle est considérée comme légitime par le Conseil de Prud’hommes, produit les effets d’un licenciement injustifié. De telle sorte que l’employeur sera condamné à payer au salarié : des dommages intérêts, une indemnité de licenciement (si le salarié avait l’ancienneté requise pour en bénéficier), ainsi qu’une indemnité compensatrice de préavis.

Mais la médaille peut aussi comporter son revers.

En effet, si le Conseil de Prud’hommes estime que la prise d’acte n’était pas justifiée, soit parce que les manquements reprochés à l’employeur étaient infondés, soit parce qu’ils n’étaient pas suffisamment graves, le salarié devra payer à son employeur une indemnité compensatrice de préavis.

C’est la solution qu’adopte avec constance la Cour de cassation, afin probablement de dissuader les plaideurs trop téméraires…(chb. sociale 8 juin 2011, n° 09-43208).

Une échappatoire au paiement à l’employeur d’une indemnité compensatrice de préavis : lorsque le salarié est en arrêt maladie

Lorsque le salarié est en arrêt maladie au moment où il prend acte de la rupture de son contrat de travail, son contrat de travail se trouve suspendu.

Il ne peut donc être condamné à payer à l’employeur une indemnité compensatrice de préavis qu’il n’était pas en état d’exécuter.

Cette alternative permet ainsi au salarié de limiter ses risques financiers si son action échoue.

C’est le moyen qu’avait développé avec succès un salarié dans une affaire sur laquelle la Cour de cassation avait à se prononcer :

Le salarié soutenait se trouver en arrêt de travail lorsqu’il a pris acte de la rupture de son contrat de travail de sorte qu’il ne saurait être tenu à l’égard de son employeur d’une indemnité compensatrice de préavis afférente à cette période (Cass. soc. 22 janv. 2025 n° 22-16608)