Par Franc Muller – Avocat droit du travail, Paris

 

Interdiction du licenciement lié à l’état de maladie dont est affecté le salarié

Contrairement à une idée reçue assez répandue, un salarié peut être licencié alors qu’il se trouve en arrêt maladie, mais, et il s’agit d’une nuance importante, l’employeur ne peut invoquer sa maladie comme motif de licenciement.

Une telle motivation contreviendrait en effet aux dispositions de l’article L 1132-1 du Code du travail, qui prévoit qu’aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé.

La jurisprudence admet en revanche que les répercussions provoquées, objectivement, par l’absence du salarié sur le fonctionnement de l’entreprise puisse constituer un motif de licenciement.

Mais le licenciement est autorisé en raison des conséquences provoquées par cet arrêt sur le fonctionnement de l’entreprise

L’employeur rédigera alors la lettre de rupture en arguant que l’absence prolongée du salarié, ou ses absences répétées, perturbe le bon fonctionnement de l’entreprise et nécessite son remplacement définitif (un remplacement invaliderait le licenciement) ce dont il devra justifier en cas de litige.

Précisément, si le salarié conteste son licenciement et qu’il obtient gain de cause, on s’est interrogé sur la nature de la sanction attachée au caractère infondé du licenciement : celui-ci est-il nul ou sans cause réelle et sérieuse ?

La distinction est loin d’être insignifiante et emporte des conséquences importantes.

Si le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, l’indemnité octroyée au salarié sera comprise entre les bornes fixées par le désormais incontournable « barème Macron » (article L 1235-3 du Code du travail), tandis que s’il est jugé nul, non seulement le barème ne sera pas applicable, mais la réintégration du salarié dans l’entreprise pourra, le cas échéant, être ordonnée par le Juge, auquel cas, l’intéressé aura droit au paiement des salaires dont il a été privé entre la date de son licenciement et celle de sa réintégration.

Ce débat a été tranché par Chambre sociale de la Cour de cassation qui considère que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, non pas nul (Cass. Soc. 1er février 2017 n° 15-17101).

Mais elle réserve néanmoins une exception.

Lorsque l’arrêt de travail du salarié est lié au harcèlement moral qu’il a subi, son licenciement est nul

En effet, lorsque l’absence prolongée du salarié est la conséquence du harcèlement moral dont il a été l’objet ; dans ce cas particulier, le licenciement du salarié est nul, l’employeur ne pouvant se prévaloir de la perturbation que son absence prolongée a causé au fonctionnement de l’entreprise (Cass. Soc. 30 janv. 2019 n° 17-31473).

La Haute Juridiction pointe en effet très clairement sa responsabilité dans l’état du salarié :

« L’absence prolongée du salarié était la conséquence du harcèlement moral dont il avait été l’objet, ce qui excluait la possibilité pour l’employeur de se prévaloir de la perturbation que son absence prolongée avait causé au fonctionnement de l’entreprise » (Cass. soc. 11 oct. 2006 n° 04-48314).

Pour caractériser cette situation de harcèlement moral, le salarié bénéficiera du régime probatoire favorable applicable en la matière (article L 1154-1 du Code du travail), et devra présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, en sorte qu’il reviendra alors à l’employeur d’établir que le licenciement était justifié par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (Cass. Soc 15 janv. 2014 n° 12-20688).

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