Par Franc Muller – Avocat rupture conventionnelle, Paris

 

La rupture conventionnelle n’a pas vocation à être une nouvelle forme de licenciement

La rupture conventionnelle rencontre un vif succès depuis son instauration par la loi du 25 juin 2008, il s’en conclurait plus de 20 000 par mois selon les chiffres publiés par le ministère du travail, et le rythme va crescendo.

Ce dispositif permet, on le sait, à l’employeur et au salarié de convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie (article L 1237-11 C.Trav).

Après que la convention ait été signée, un délai de rétractation de 15 jours calendaires est ouvert à chacune des parties.

A l’issue de ce délai, la partie la plus diligente, l’employeur la plupart du temps, adresse un exemplaire de la rupture conventionnelle à la direction du travail (DIRECCTE) qui dispose à son tour d’un délai d’instruction de 15 jours ouvrables pour l’homologuer ou non.

Concrètement, l’expérience montre que certains employeurs indélicats utilisent volontiers ce dispositif dans le but de se séparer de salariés, car ils y trouvent plus d’avantages qu’au licenciement, notamment en raison de la souplesse qui leur est offerte et de l’absence de nécessité d’invoquer un motif.

Une affaire que nous avons récemment plaidée illustre qu’une telle pratique les expose justement à la sanction des Juges.

Des manœuvres condamnées par les Juges

Un salarié avait été approché par son employeur qui souhaitait mettre un terme à son contrat de travail sans invoquer de motif, ce que l’intéressé avait eu la présence d’esprit d’acter par écrit.

Après discussions ultérieures, qui ne laissaient guère d’alternative au salarié, il avait été contraint de signer une rupture conventionnelle antidatée, de telle sorte que le délai de rétractation avait expiré.

La convention avait été ensuite homologuée par le DIRECCTE.

Le salarié s’étant senti floué avait saisi le Conseil de Prud’hommes afin de faire valoir ses droits, et soutenait que la rupture conventionnelle était nulle, car dissimulant en réalité un licenciement.

La Cour d’appel de Rouen vient de lui donner raison (Chb. sociale, 13 mars 2012, n° 11/03543).

La Cour énonce en forme de principe « qu’une rupture amiable ne peut intervenir qu’en l’absence de litige entre les parties ; le véritable choix qui doit être offert au salarié est de quitter librement l’entreprise ou de rester, et non celui de décider de la forme de son départ ».

Il est en effet inadmissible que la rupture conventionnelle se substitue ainsi au licenciement.

Les salariés victimes de ces pratiques ne doivent donc pas hésiter à saisir les Conseils de prud’hommes afin de faire requalifier la rupture de leur contrat de travail.

Ils disposent pour ce faire d’un délai d’un an à compter de la date d’homologation de la convention (article L 1237-14 du Code du travail).

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