Franc Muller – Avocat rupture conventionnelle, Paris

 

La rupture conventionnelle : les conditions de remise en cause de sa validité sont très limitées

Les décisions relatives à des litiges portant sur la rupture conventionnelle se suivent… et se ressemblent.

On a désormais bien compris que la jurisprudence était constante sur plusieurs points.

C’est ainsi que :

  • La rupture conventionnelle ne peut être remise en cause qu’en cas de fraude ou de vice du consentement, qui doit être démontrée par le salarié qui l’invoque (Cass. soc 28 mai 2014 n° 12-28082),

Mais toutes les situations de fait et de droit n’ayant pas encore épuisé la sagacité des Juges, c’est avec grand intérêt que l’on prend connaissance des derniers arrêts publiés par la Cour de cassation.

1-La rupture conventionnelle pendant le congé de maternité de la salariée est possible

La Haute juridiciton lève le voile sur une question qui taraudait les praticiens du droit du travail.

Est-il possible de conclure une rupture conventionnelle avec une salarié pendant la durée de son congé de maternité, ainsi le cas échéant, que pendant les quatre semaines de protection dont elle bénéficie à sa suite ?

L’interrogation est pertinente, car l’article L 1225-4 du Code du travail dispose qu’aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté et pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes.

Cet article est en outre complété par l’article L 1225-4-1, qui prévoit qu’aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’un salarié pendant les quatre semaines suivant la naissance de son enfant

Les Hauts magistrats ne semblent pourtant pas y voir un obstacle à la conclusion d’une rupture conventionnelle.

Une salariée était en congé de maternité du 18 avril 2009 au 7 août 2009, et avait conclu avec son employeur une rupture conventionnelle le 10 août, qui a fait l’objet d’une homologation par l’autorité administrative le 7 septembre 2009.

Il ressort de cette chronologie que la salariée bénéficiait encore du statut protecteur au moment de sa conclusion.

La salariée avait saisi la juridiction prud’homale et formait une demande de dommages intérêts pour licenciement nul.

Tant la Cour d’appel que la Cour de cassation l’en ont débouté.

La Haute Juridiction énonce ainsi que, sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, qui n’étaient pas invoqués en l’espèce par la salariée, une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes.

Seuls auraient donc permis de faire échec à la rupture conventionnelle, la preuve établie par la salariée d’une fraude de son employeur ou d’un vice du consentement (erreur, dol, violence…) de sa part.

On ne répétera cependant jamais assez la difficulté concrète à laquelle les salariés sont confrontés à rapporter la preuve de ces actes.

L’interprétation extensive de la loi donnée par les magistrats de la Chambre sociale de la Cour de cassation a de quoi laisser songeur.

Elle n’est pourtant guère surprenante, car ils avaient exprimé les mêmes considérations pour justifier qu’une rupture conventionnelle puisse être valablement conclue au cours de la période de suspension consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. soc 30 sept. 2014 n° 13-16297), alors que le Code du travail pouvait laisser à supposer le contraire.

Cette sollicitation des textes nous avait déjà interpellé.

2-La transaction ne peut être conclue que postérieurement à l’homologation de la rupture conventionnelle

Dans une seconde décision, la Cour de cassation était amenée à se prononcer à nouveau sur l’articulation entre une rupture conventionnelle et une transaction.

Un salarié et son employeur avaient signé une rupture conventionnelle le 22 juillet 2009 fixant la fin de leur relation de travail au 31 août 2009, elle avait été homologuée par la DIRECCTE le 12 août 2009.

En parallèle, les parties avait également conclu une transaction destinée à mettre fin à toute contestation résultant de la conclusion, de l’exécution et de la rupture du contrat de travail, formalisée par deux actes rédigés, le premier, le 22 juillet 2009 et le second, le 28 août 2009.

A la suite d’un litige les opposant, le salarié avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande en paiement de l’indemnité prévue à la transaction.

Les Hauts magistrats rappellent à cette occasion la solution qu’ils avaient précédemment énoncée : «  un salarié et un employeur ayant signé une convention de rupture ne peuvent valablement conclure une transaction, d’une part, que si celle-ci intervient postérieurement à l’homologation de la rupture conventionnelle par l’autorité administrative, d’autre part, que si elle a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture » (Cass. soc 25 mars 2015 n° 13-23368).

Or, la transaction qu’ils avaient signée mentionnait expressément qu’elle avait pour objet de « régler de façon globale, forfaitaire et définitive tous litiges pouvant se rattacher à l’exécution du contrat de travail de Monsieur Christophe X… et à la rupture de celui-ci. »

La Cour de cassation précise, tout d’abord, que l’employeur et le salarié ne peuvent, pour remettre la rupture conventionnelle, éluder l’application des dispositions du code du travail prévoyant la saisine du conseil de prud’hommes.

Rappelons à cet égard que l’article L 1237-14 du Code du travail prévoit que tout litige concernant la convention, l’homologation ou le refus d’homologation relève de la compétence du conseil des prud’hommes, et que recours juridictionnel doit être formé dans un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention.

Ils ajoutent en outre, qu’il résulte de la formulation employée, que la transaction avait pour objet de régler un différend relatif à la rupture du contrat de travail, ce qui la privait donc de validité.

Loi Hamon, nullité de la cession
Quels documents produire en cas de litige ?