Par Franc Muller – Avocat droit du travail, Paris

 

Après la loi Macron du 6 août 2015 (loi n° 2015-990 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques), la loi El Khomri du 8 août 2016 (loi n° 2016-1088 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels), en marche vers une troisième réforme du Code du travail en deux ans.

Avocat licenciement, Paris

Nouvelle réforme en droit du travail

Le nouveau Président n’a en effet eu de cesse d’annoncer qu’il souhaitait que le parlement vote dès cet été une loi d’habilitation autorisant le gouvernement à légiférer sous forme d’ordonnances afin de « prendre des mesures pour la rénovation sociale. »

Les grandes orientations de ce texte législatif, parfaitement univoque, ont été dévoilées il y a quelques jours.

Le ton n’est plus désormais à la flexi-sécurité, combinant flexibilité pour les employeurs et sécurité pour les salariés, mais en l’état, les employeurs sont les bénéficiaires exclusifs des modifications envisagées en droit du travail, où on peine à trouver des dispositions qui puissent profiter aux salariés.

Qu’on en juge, entre autres :

  • Barème obligatoire devant les Conseils de Prud’hommes fixant un plancher et un plafond des indemnités allouées au salarié en cas « d’irrégularités de licenciement » (cit). On rappellera néanmoins que le décret du 23 novembre 2016 fixe déjà un barème indicatif, qui devait servir de référentiel ;
  • Appréciation du motif économique uniquement en considération de la situation de l’entreprise en France, et non plus au niveau du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient, incluant les entreprises situées à l’étranger ;
  • Réduction des délais de recours en cas de rupture du contrat de travail, passant de deux ans à un an ;
  • Recours au contrat à durée indéterminée de projet conclu pour la durée d’un chantier, puis rupture du contrat de travail à son achèvement ;
  • Elargissement du champ des accords d’entreprise, au détriment des accords de branches ;
  • Fusion des instances représentatives du personnel (DP,C.E, CHSCT),

La potion risque d’être amère pour les salariés !

L’objectif poursuivi, qui inspirait déjà les deux précédentes lois, vise non seulement à limiter les possibilités, et les moyens, de contestation de leur licenciement par les salariés, mais lorsqu’ils obtiennent gain de cause devant la juridiction prud’homale, à limiter le montant des indemnités auxquelles l’employeur sera condamné.

Il n’en fallait pas davantage pour rassurer les employeurs qui décrient constamment, souvent à tort, les Conseils de Prud’hommes qui feraient systématiquement droit aux demandes des salariés.

Outre que cette affirmation est inexacte, on a tendance à oublier qu’une condamnation prud’homale sanctionne un employeur qui a licencié un salarié de façon illicite, et partant, a méconnu la loi, ce qui n’est pas anodin.

Au demeurant, l’argumentation classique développée par les organisations représentatives d’employeurs, dotée d’une résonance particulière en période de taux de chômage élevé, consiste à soutenir que les litiges prud’homaux constitueraient un frein à l’embauche pour les entreprises.

Cette thèse n’est pourtant pas convaincante.

Une étude du Conseil de l’étude de l’emploi (CEE) a au contraire démontré que c’est la hausse du chômage qui provoque un nombre plus élevé de recours judiciaires par les salariés, et non l’inverse.

Dans sa dernière note de conjoncture (de juin 2017), l’INSEE révèle en outre que les freins à l’embauche les plus cités par les entreprises sont : l’incertitude sur la situation économique (pour 28 % des entreprises interrogées), la difficulté à trouver une main d’œuvre compétente (27 %) et un coût du travail jugé trop élevé (23 %).

Il convient donc d’arrêter de s’abriter derrière des prétextes fallacieux pour entreprendre une réforme du droit du travail, qui aura véritablement valeur emblématique de la détermination et du rapport de forces qu’entend instaurer le pouvoir qui vient d’être choisi par les urnes.

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