Par Franc Muller – Avocat droit du travail, Paris

 

Durée du préavis

Le licenciement d’un salarié, qu’il soit pour motif personnel ou pour motif économique, s’accompagne de l’exécution d’un préavis, couvrant une période transitoire qui débute à la date de notification du licenciement et s’achève à l’expiration du contrat de travail.

Cette règle connait cependant une exception, prévue par l’article L 1234-1 du Code du travail : en cas de licenciement pour faute grave, aucun préavis n’est exécuté, la rupture du contrat de travail intervenant dès la notification du licenciement.

Le même texte détermine la durée du préavis, qui varie selon l’ancienneté du salarié dans l’entreprise : moins de 6 mois, il y a lieu de se référer à la convention collective ou aux usages ; entre 6 mois et moins de 2 ans, le préavis est d’une durée d’un mois ; plus de 2 ans, le préavis est d’une durée de 2 mois.

En dehors de cette durée légale, ce sont les conventions collectives qui déterminent la durée du préavis, en prenant en considération l’ancienneté du salarié et la catégorie professionnelle à laquelle il appartient.

Étant précisé que la plupart des conventions collectives fixent une durée de préavis de 3 mois pour les cadres, avec toutefois quelques dérogations (ex : la durée est de 6 mois pour les ingénieurs et cadres de plus de 55 ans soumis à la convention collective de la métallurgie).

Dispense d’exécution du préavis à l’initiative de l’employeur

Lorsque la dispense d’exécution du préavis est à l’initiative de l’employeur, ou qu’elle lui est imputable, celui-ci est tenu au paiement aux échéances habituelles.

L’employeur peut dispenser le salarié de l’exécution du préavis après l’avoir licencié.

Cette dispense, qui doit de préférence être confortée par un écrit, peut être mentionnée dans la lettre de licenciement elle-même, auquel cas le salarié n’effectue aucun préavis dès la notification de la décision.

Elle peut également intervenir en cours de préavis, et donc être partielle, l’employeur ayant toute latitude pour dispenser le salarié à la date qu’il choisit.

Certains salariés, même si ce ne sont pas les plus nombreux, souhaitent exécuter leur préavis, qu’il s’agisse d’une volonté mener à bien un travail en cours ou de profiter des facilités matérielles que leur offre l’entreprise pour rechercher un nouvel emploi.

Cependant, la décision de l’employeur de dispenser, ou non, l’intéressé du préavis, qui relève de son pouvoir de direction, s’impose au salarié qui ne peut valablement s’y opposer.

Il importe également de retenir que l’inexécution du préavis, en cas de dispense par l’employeur, n’entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise (article L 1234-5 du Code du travail).

Il en résulte en particulier que le salarié peut conserver le véhicule dont il disposait lorsqu’il était à usage personnel et professionnel.

En outre, les primes sur objectifs sont dues au salarié, lorsque les conditions de paiement sont réunies, sans que l’employeur puisse invoquer l’existence du préavis pour s’y soustraire.

Demande de dispense d’exécution du préavis par le salarié après la notification du licenciement

La perspective de devoir effectuer un préavis peut être vécue comme un désagrément par le salarié, qui ne souhaite pas continuer à travailler dans de telles circonstances, ou plus simplement a eu la chance de retrouver un emploi rapidement de sorte qu’il doit être disponible.

Le salarié prend alors l’initiative de demander à l’employeur de le dispenser de travail pendant la durée du préavis.

Si l’employeur accède à cette demande, ce qu’il est en droit de refuser, il ne sera pas obligé au paiement du salaire pendant cette période.

En outre, le salarié ne pourra pas non plus prétendre au bénéfice de l’assurance chômage entre la date de fin effective de son contrat de travail et celle de la fin théorique de son préavis (non exécuté) (Cass. Soc. 26 juin 2008 n° 07-15478).

Demande de dispense d’exécution du préavis par le salarié avant que le licenciement lui ait été notifié

La Chambre sociale de la Cour de cassation vient d’apporter une précision utile dans cette situation.

Une salariée est licenciée pour motif économique, celui-ci lui étant notifié le 27 mai 2016.

Elle avait été préalablement informée le 15 avril 2016 de la suppression de son poste et du plan de mobilité professionnelle mis en œuvre par son employeur, et lui avait alors indiqué, par lettre du 22 avril 2016, qu’ayant retrouvé un nouvel emploi, elle souhaitait pouvoir être disponible le 3 juin 2016.

L’employeur avait répondu favorablement à cette demande et l’avait dispensée du préavis à partir du 3 juin 2016, cette date étant postérieure à la notification du licenciement.

Il avait en conséquence cessé de payer le salaire de l’intéressée à cette date.

Celle-ci avait néanmoins saisi la juridiction prud’homale, notamment d’une demande de paiement de salaire jusqu’à la date de fin du préavis non exécutée.

Elle obtient gain de cause.

La Cour régulatrice rappelle en effet que, selon l’article L 1231-4 du Code du travail, l’employeur et le salarié ne peuvent renoncer par avance au droit de se prévaloir des règles du licenciement.

Or, la salariée avait renoncé le 21 avril 2016 à l’exécution du préavis, cette renonciation n’était pas valable comme intervenue avant la notification de son licenciement le 27 mai 2016, peu important la communication par l’employeur d’un plan de mobilité professionnelle avant cette date (Cass. Soc. 7 déc. 2022 n° 21-16000).

L’employeur est donc condamné à lui payer une indemnité compensatrice de préavis, ainsi que les congés payés afférents.

Est-il possible de travailler pour un nouvel employeur pendant la durée du préavis non exécuté ?

Le salarié ayant été dispensé par l’employeur de l’exécution de son préavis peut parfaitement reprendre un nouvel emploi pendant cette période.

Cette possibilité a été admise de longue date, y compris s’il est embauché par une entreprise concurrente (Cass. Soc. 27 nov. 1991 n° 88-43917).

La seule restriction, à laquelle le salarié doit être vigilent, concerne l’obligation de non-concurrence.

Si le contrat de travail comportait une clause de non-concurrence, dont la validité n’est pas contestable, le salarié devra en respecter les termes, et en conséquence s’abstenir de travailler au service d’une entreprise exerçant une activité concurrente de celle de l’employeur qu’il quitte.

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