Par Franc Muller – Avocat licenciement, Paris
Les juridictions sociales se font l’écho de questions qui taraudent la société civile
Après s’être prononcée il y a trois ans sur le port du voile islamique dans l’entreprise, la chambre sociale de la Cour de cassation vient de statuer sur les conditions dans lesquelles un employeur pouvait exprimer des exigences, limitatives, sur l’apparence de la barbe portée par un salarié.
Elle fait application à cette occasion des règles qu’elle avait élaborées dans cette première affaire, largement inspirées par le droit communautaire.
La Haute juridiction avait alors considéré que le règlement intérieur d’une entreprise ou une note de service soumise aux mêmes dispositions pouvait valablement comporter une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail.
Toutefois, l’interdiction faite à la salariée de porter le foulard islamique dans ses contacts avec les clients résultait seulement d’un ordre oral qui lui avait été donné et visait un signe religieux déterminé, ce dont il résultait l’existence d’une discrimination directement fondée sur les convictions religieuses (Cass. soc. 27 nov. 2017 n° 13-19855).
Étant précisé si la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 prévoit que les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle et déterminante et proportionnées au but recherché, la volonté d’un employeur de tenir compte des souhaits d’un client de ne plus voir ses services assurés par une salariée portant un foulard islamique ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante.
La demande, réelle ou supposée, d’un client ne plus être en contact avec une salariée portant un voile islamique n’est donc pas, en tant que telle, une cause suffisante pour évincer l’intéressée.
Dans cette nouvelle affaire, un salarié avait été embauché en qualité de consultant en sécurité par une entreprise de conseil aux entreprises dans le domaine de l’information, de l’analyse et de la gestion des risques.
Spécialiste du proche et moyen orient, il avait été affecté immédiatement après son embauche au Yémen, pays connaissant une situation de guerre civile sur fond de querelle religieuse.
L’employeur l’avait licencié pour faute en invoquant entre autres motif le fait que le salarié portait une « barbe, taillée d’une manière volontairement très signifiante au