Franc Muller – Avocat Rupture conventionnelle, Paris

Les conditions d’une renonciation du salarié à contester la rupture de son contrat de travail

La bienveillance dont la Cour de cassation fait preuve à l’égard de la rupture conventionnelle vient de recevoir une nouvelle illustration (Cass. soc 26 juin 2013 n° 12-15208).

Nous avons déjà amplement commenté ce mode de rupture du contrat de travail, dont la validité exige le commun accord des parties (article L 1237-11 du Code du travail).

Mais il n’est pourtant pas rare que l’employeur use de son ascendant à l’égard d’un salarié afin de le contraindre à accepter une rupture conventionnelle.

L’office du juge, saisi d’un recours en annulation d’une rupture conventionnelle, consiste donc essentiellement à s’assurer de la validité du consentement donné par le salarié.

La loi prévoit par ailleurs que la rupture conventionnelle exclut le licenciement, de sorte qu’aucune confusion ne doit exister entre ces deux mécanismes.Rupture conventionnelle et transaction

Revenons brièvement, afin de bien comprendre la portée de la décision de la Cour de cassation, sur le licenciement.

Lorsqu’un salarié est licencié, et qu’il en conteste le bienfondé, il arrive que, postérieurement à ce congédiement, l’employeur ayant conscience du risque judiciaire qu’il encourt, conclue avec le salarié une transaction.

La transaction est un acte juridique par lequel les parties à un litige y mettent un terme amiable en se faisant des concessions réciproques.

Elle est matérialisée dans un document écrit, généralement intitulé « protocole d’accord transactionnel » précisant les modalités de l’accord des parties.

Ainsi, en contrepartie de sa renonciation à contester en justice son licenciement, le salarié bénéficie d’une indemnité transactionnelle, d’un montant convenu, destinée à l’indemniser des préjudices qu’il a subis.

Cette exigence constitue un élément déterminant de la transaction ; l’employeur est certes disposé à indemniser le salarié, mais à la condition, fort logique, qu’il ne soit pas attrait devant une juridiction afin d’y subir les foudres judiciaires.

La « renonciation à tout recours » réputée non écrite mais la convention de rupture reste valable

Pour revenir à l’affaire qui nous concerne, un salarié avait conclu avec son employeur une rupture conventionnelle, contenant une clause selon laquelle « les parties renonçaient irrévocablement à toutes autres actions ou prétentions de quelque nature que ce soit qui résulteraient de l’exécution ou de la cessation du contrat de travail. »

Une telle formulation est usuelle dans les transactions, et elle pourrait laisser à penser que cette rupture conventionnelle masquait en réalité une transaction dissimulée, qui s’avérerait illicite, les deux notions n’ayant pas la même cause.

L’inspection du travail avait néanmoins autorisé la rupture conventionnelle (en effet, lorsque le salarié est investi d’un mandat représentatif du personnel, ce qui était le cas en l’espèce, il appartient à l’inspection du travail d’autoriser la rupture conventionnelle).

Le salarié avait saisi le Conseil de Prud’hommes afin d’obtenir la requalification de cet acte en transaction et de voir prononcer sa nullité.

Les juges ne font pas droit à sa demande et il en est débouté.

La Cour de cassation rappelle dans cet arrêt que l’existence d’un différend au moment de la conclusion d’une convention de rupture n’affecte pas en elle même la validité de cette convention, ce qui est une réitération de sa jurisprudence récente.

Elle ajoute en outre qu’une clause de renonciation à tout recours contenue dans une convention de rupture doit être réputée non écrite sans qu’en soit affectée la validité de la convention elle-même.

En clair, la phrase litigieuse portant renonciation du salarié à tout recours est exclue, mais la rupture conventionnelle, elle-même, reste valable, les juges n’ayant au demeurant pas constaté l’existence d’un vice du consentement.

On aurait naïvement pu imaginer que l’assimilation de la rupture conventionnelle à une transaction suffisait à remettre en cause sa validité, dés lors qu’elle semblait induire l’existence d’un litige entre les parties, mais ce n’est manifestement pas le raisonnement adopté par les Hauts magistrats, qui font preuve d’une mansuétude à toute épreuve à l’égard de la rupture conventionnelle.

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